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Jean-Marc Toussaint

Dans l’ancien pavillon de chasse des Rothschild, Guillaume Guibet propose une cuisine d’auteur servie par ses parents !

# Voyage gourmand# Les bonnes tables

# Oise

L’ancien pavillon de chasse de la famille Rothschild, construit en 1886 à Saint-Maximin dans l’Oise abrite désormais le Verbois, un hôtel-restaurant auréolé d’une étoile Michelin depuis 2021. En cuisine, le jeune chef Guillaume Guibet, revenu pour aider son père pour quelques mois a finalement fait le choix de poursuivre l’aventure familiale.

Guillaume Guidet a repris les cuisines du restaurant familal en 2016 à l'âge de 21 ans.

« Aux âmes bien nées, la valeur n’attend pas le nombre des années » écrivait Corneille dans le Cid. Une évidence pour Laurent Guidet, quand il se remémore l’enfance de son fils, Guillaume. « Certains gamins n’ont qu’une hâte quand il sorte de l’école : jouer aux petites voitures ou taper dans un ballon. Guillaume, c’était au restaurant qu’il s’amusait le plus. A 8 ans, il servait le pain et les amuses bouches sur les tables. A 11 ans, il faisait déjà des gâteaux à la pâtisserie. A 15 ans, il s’occupait des sauces » raconte son père. « J’ai toujours voulu être cuisinier » confirme le fiston, formé au lycée hôtelier du Touquet.

Une fois son bac pro en poche, on lui propose de poursuivre en BTS, mais il refuse, convaincu « qu’on apprend toujours plus en travaillant » que sur les bancs de l’école. Mais cette formation, il ne la veut pas n’importe où. A Guy Savoye qui lui propose une place de commis au Chiberta plutôt que dans son restaurant triplement étoilé, il refuse, préférant l’original à la copie. Il échoue finalement chez Kei Kobayashi, le plus japonais des chefs parisiens. « Un immense cuisinier doublé d’un technicien hors pair » se souvient Guillaume Guibet avec qui il a eu la chance de voyager au Japon « pour s’imprégner de sa vision, à la découverte des produits et de cet art culinaire si singulier ».

Une cuisine durable et réconfortante

Trois ans et demi plus tard, il est responsable de la cuisson des viandes et s’imagine « changer d’air » pour parfaire sa formation. « J’hésitais entre « Le cinq », le restaurant de l’hôtel Georges V dirigé par Christian Le Squer et « Le Gabriel » de Jérôme Banctel » raconte-t-il. Une équation qu’il n’aura jamais l’occasion de résoudre. Au Verbois, ses parents doivent faire face à une forte pénurie de personnel et ils l’appellent à la rescousse. A 21 ans, l’enfant prodigue accepte de revenir pour quelques mois, le temps de renouveler la brigade. « Très vite, mon père m’a laissé les clés de la cuisine pour rejoindre ma mère en salle. J’ai pu commencer à changer les plats et je suis finalement resté ».

Dès lors, le Verbois va connaître une succession de transformation. La salle de restaurant, le bar et la cuisine sont rénovés. Un potager, une serre à agrumes, mais aussi une seconde salle sont créés, puis cinq suites en bois et métal s’ouvrent dans le parc, à l’arrière du restaurant.

Aux fourneaux, il insuffle une cuisine empreinte de renouveau, « une cuisine contemporaine, sensible, durable et réconfortante qui réunit les générations ». « Il m’a fallu deux ans pour trouver ma voix et me défaire de la cuisine de Kei Kobayashi. Aujourd’hui, j’ai le sentiment que ma cuisine a muri et qu’elle s’est complexifiée » observe-t-il.

Des influences japonaises

Mais il reste de façon indélébile des influences de son mentor japonais : ses techniques de cuisson, mais aussi des produits tel que le miso, le sésame noir, le soja et le yuzu qu’il utilise notamment pour les sauces. Il continue également de cuisiner le bœuf de Kobé et les poissons ikéjime, « une technique d’abatage qui permet de mieux préserver leurs qualités gustatives ».

Pour le reste, Guillaume Guibet cuisine à l’instinct en fonction des arrivages. « Je ne travaille que des poissons de ligne et je fais avec ce que m’envoie mon pécheur. C’est pourquoi je n’ai pas de carte » explique le jeune chef qui sait aussi être audacieux dans ses choix. Témoin ce choux fleur à la vanille servi en dessert avec une glace à la cacahuète et au caramel beurre salé ou encore cette sauce homardine réalisé avec du jus de betteraves, des fruits rouges, du pied de cochon et de la moelle !

Il ne craint pas non plus à associer ses ravioles d’Osso bucco avec de la truffe blanche d’Alba. Il aime les sauces condimentées qui ont du caractère, les vinaigres de sureau et de piment qu’il fabrique lui-même, mais aussi les huiles de coriandre, de basilic et de feuilles de figuier.

Et pourquoi pas une boulangerie ?

Parallèlement, il n’hésite pas, dans cet ancien relais de chasse à cuisiner les grands classiques de la cuisine française : le lièvre à la royale ou le Pithiviers de foie gras et de colvert. Un art que lui a transmis Gérard Besson, MOF et ancien double étoilé Michelin.

Sa cuisine de saison sait être réconfortante quand l’agneau retrouve les petits pois printaniers et s’abandonne à la gourmandise d’un beurre au romarin. Elle sait aussi s’élever dans l’élégance d’un Saint-Pierre aux girolles, relevé d’un jus délicat de câprier. Ici point de plat signature qui s’enracine dans son quotidien. Le jeune chef aime le changement. « Ce qui est intéressant en cuisine, c’est de créer, d’inventer » argue-t-il. Sa cuisine, récompensée d’une étoile au Michelin depuis 2021 et de trois toques au Gault et Millau peut également se reposer sur une cave conséquente de près 1600 références « uniquement françaises ».

L’avenir appartient aux audacieux dit l’adage. Guillaume Guibet n’en a sans doute pas fini d’écrire sa propre histoire. Il a maintenant l’idée « pour compléter son offre » d’ouvrir une boulangerie sur le domaine familial, au bord de la route départementale qui relie Creil à Chantilly, l’une des plus passantes de Picardie.

Ceviche de dorade avec ses carottes cuites et crues, sauce peruvienne.

Infos pratiques

Le Verbois

 6, la Grande Folie

60 740 Saint-Maximin

Dans l’ancien pavillon de chasse des Rothschild, Guillaume Guibet propose une cuisine d’auteur servie par ses parents !
Un reportage de Jean-Marc Toussaint