
Quand on dit caviar, on imagine souvent les tables des fêtes des tsars en Russie. Las, les temps où 1000 tonnes de caviar par an provenaient de la mer Caspienne sont révolus, l’esturgeon sauvage est menacé d’extinction par la pollution et la surpêche.
La pêche intensive a également sonné le glas de l’espèce en France, où les esturgeons évoluaient également dans la Garonne et la Dordogne. Mais à l’époque, ces poissons étaient pêchés pour la qualité de leur chair. Le précieux caviar (leurs œufs) était utilisé comme appât pour les sardines ou donné aux canards ! Lorsqu’un restaurateur parisien lance la mode du caviar au début du 20e siècle, la pêche s’intensifie dans l’estuaire de la Gironde, au point qu’il aura fallu l’interdire en 1973. Le sauvetage de l’esturgeon passe alors par l’élevage de la variété Acipenser baerli, qui nait et évolue en eau douce.
En Gironde, un ancien élevage de truites du moulin de la Cassadotte à Biganos dans le Bassin d’Arcachon, a fait partie de cette aventure et devint la première ferme aquacole française dédiée à l’élevage d’esturgeons. En 1985, 200 spécimens rejoignent les bassins du moulin. Trois ans plus tard, 10 000 alevins sont nés. 1993 voit la 1ere production du caviar made in France.
Depuis, d’autres bassins sont creusés sur le site, et aujourd’hui, quelque 70 000 esturgeons de toutes les générations évoluent pendant de longues années dans ces bassins alimentés par les eaux du ruisseau de Lacanau.
Ils profitent de nombreux bassins pour pouvoir nager et se développer librement, presque comme dans leur milieu naturel. Ce site préservé, entouré de forêts de pins, garantit des conditions optimales à cet élevage qui demande beaucoup de patience : ce n’est qu’à l’âge de 10 ans que les fameux œufs arrivent à maturité
Des filets protègent les bassins dans lesquels s’ébattent les tout petits esturgeons : au grand dam des oiseaux de la réserve ornithologique du Teich voisine qui y feraient bien un festin !
A l’âge de 4 ans, une échographie de chaque poisson détermine leur genre : les mâles sont alors vendus en Allemagne où ils continuent à être élevés avant de partir pour les pays de l’Est, où la chair d’esturgeon est très appréciée. Quant aux femelles, elles continuent à profiter de leur belle vie dans les bassins du moulin. Vers l’âge de 6 ans, elles développent les premiers œufs qui grossissent et se multiplient. A 8 ans, une biopsie est pratiquée pour voir si elle a effectivement des œufs. Chaque esturgeon reçoit une bague d’identification à la nageoire. Deux ans plus tard, une nouvelle biopsie vérifie sir les œufs sont à bonne maturité.
Les poissons sont alors transférés dans un bassin d’affinage alimenté par l’eau de source pendant 15 jours. Au bout de dix ans, c’est fini la belle vie puisqu’il faut prélever les précieux œufs qui représentent 10% du poids du poisson.
La poche contenant l’or noir est enlevée et frottée délicatement pour libérer les œufs. Après avoir été nettoyé d’éventuelles impuretés (résidus de la poche), les œufs sont délicatement brassés avec du sel. Après l’égouttage, ils sont mis en pots pour l’affinage en chambre froide. Tout se fait à la main et en 1h30 maximum.
Le caviar peut être produit toute l’année, mais l’activité se concentre surtout sur septembre et octobre : 75% du caviar est vendu à l’occasion des fêtes de fin d’année.
Toutes les parties de l’esturgeon sont utilisées. La chair est transformée en rillettes ou en filets fumés, la peau peut être travaillée en maroquinerie. Caviar de France maîtrise toute la chaîne de production sur son site. Sur rendez-vous, des visites guidées du Moulin de la Cassadotte (avec une dégustation) sont proposées d’avril à septembre. Il est également possible de faire une dégustation à la boutique (10 € à 22 € selon la qualité du caviar).