
L’Islande a son Cercle d’or. Trois sites touristiques majeurs s’y concentrent : Thingvellir, et la faille de l’Almannagjá, haut-lieu géologique et démocratique pour avoir abrité dès le Xe siècle l’Althing, le premier Parlement islandais, Geysir réputé pour ses jaillissements hors norme de vapeur et d’eau, enfin Gullfoss, la « chute d’or ». Tous sont aisément accessibles de Reykjavik, la capitale de l’île de glace et de feu. Ces beautés naturelles valent assurément le détour. S’en éloigner n’est ni risque, ni déraison pour qui aime s’aventurer au-delà de l’extraordinaire patenté.
Stykkisholmur pour point d’ancrage
L’ouest, le grand, celui de la « péninsule du mont enneigé » ou Snaefellsnes, n’est pas si loin et mérite d’autant plus la boucle que sa réputation lui assure le surnom d’« Islande en miniature ». Rien de moins. Glacier-volcan, chutes d’eau, champs de lave chaotiques, eaux océanes refuge de baleines, falaises abruptes, plages de sable noir ou doré, fjords, entre autres curiosités naturelles sont donc au rendez-vous sur un territoire aux empreintes humaines tout aussi attractives.
Situé au sud du fjord de Breidafjördur, le port de Stykkisholmur peut sans souci constituer le point d’ancrage pour sillonner la région. La bourgade est agréable, les quais colorés de chalutiers et de bateaux d’observation des cétacés, les restaurants sont de qualité. Dans l’ancienne bibliothèque municipale, l’art contemporain séduit sous la forme de la Library of Water, la bibliothèque de l’eau, une installation de l’artiste new-yorkaise Roni Horn constituée d’immenses tubes en verre contenant de l’eau issue de glaciers islandais.

L’expérience du hákarl
Quelques édifices côtoient, eux, l’histoire, telle la Maison norvégienne datée de 1832, « premier bâtiment résidentiel de deux étages avec une structure en bois importé de Norvège - d’où son nom - à être construit en Islande ». Il abrite aujourd’hui le musée populaire de Snæfellsnes.
A quelques encâblures de là (14 km à l’ouest), à Bjarnarhofn, un autre musée dit du requin présente l’avantage d’être vivant, puisqu’attaché à une ferme spécialisée dans la production de hákarl, une spécialité culinaire islandaise à base de requin du Groenland… faisandé. On peut y découvrir les outils, les bateaux, l’environnement naturel de cette famille de pêcheurs, maîtres des lieux, tout en se familiarisant avec le processus de fabrication du hákarl, séchant au final sous des séchoirs ouverts au vent. La visite est agrémentée d’une dégustation arrosée de brennivín, boisson nationale connue sous le nom de « vin brûlé » ou « mort noire ». Tout un programme, instructif cela dit.
Les baleines d’Olafsvik
Du requin aux baleines, il n’y a qu’un pas (48 km) pour rejoindre le port d’Olafsvik, via Grundarfördur, port de pêche, lui aussi, connu pour être placé sous la protection du Mont Kirkjufell, la « montagne église », ainsi nommée pour sa forme pyramidale. Les deux ports proposent des croisières de deux à trois heures, dans les eaux cernant la péninsule, à l’ombre du glacier-volcan Snaefellsjökull. Les chanceux apprécieront les acrobaties des odontocètes, les baleines à dents, des orques, cachalots, baleines-pilotes et autres dauphins à bec blanc.
Bienvenue à Snaefellsjökull, un des trois parcs nationaux islandais, hauts-lieux naturels comme il se doit. A l’extrême-ouest de la péninsule, il s’étend du littoral à la calotte glaciaire du stratovolcan culminant à 1446 mètres. Hier destructeur, le Snaefellsjökull fut et reste à coup sûr source d’inspiration. Ne fut-il pas choisi par Jules Verne pour en faire la porte d’entrée vers les profondeurs terrestres du professeur Otto Lindenbrock, d'Axel, son neveu, et de Hans Bjelkedes, leur guide, les héros de « Voyage au centre de la terre » ? Jules Verne donc, et Halldór Laxness, Prix Nobel de littérature (1955), né et mort à Reykjavik, qui en fit le décor de son roman « Úa ou Chrétiens du glacier ».
Le fief des sternes arctiques
Mais restons sur terre et son littoral. A la pointe extrême d’Ondverdarnes, le phare de Svörtulof domine modestement, si ce n’est sa couleur agressive, Saxholsbjarg, le fief des sternes arctiques et des goélands, par ailleurs point d’observation des baleines. Dans les falaises de basalte à la noirceur tachetée de longues traînées blanchâtres, des villageois du cru pendus à une corde s’adonnaient jadis à une gestuelle acrobatique, pour collecter les œufs sur les saillies et les corniches les plus difficiles d’accès. L’été venait le tour des guillemots, arrivant du Grand nord pour pondre. Omniprésente, parfois intraitable, la nature s’impose toujours comme la toile de fond, voire l’essence d’histoires humaines. Ainsi est l’Islande, pour cela si attachante.
La péninsule déroule bien d’autres curiosités susceptibles d’attirer l’homme en vadrouille : le cratère du Saxholl, à deux pas de la route circulaire, avec vue panoramique sur les champs de lave, la trentaine de randonnées que propose le parc national, dont la cascade de Klukkufoss et ses orgues basaltiques dans la vallée d'Eysteinsdalur, ou encore au sud-ouest les hameaux côtiers d’Hellnar et Arnastapi, connus pour leurs formations rocheuses, se reflétant dans l’océan.
Sur la piste 54, la rivière Skrauma !
L’itinéraire du retour depuis Stykkisholmur emprunte la route 56 reliant le sud au nord de la péninsule, dans des paysages époustouflants. Les champs de lave, et leurs reliefs fantasmagoriques sont particulièrement impressionnants. Ne surtout pas rater, pour rejoindre le sud et la capitale, la piste 54 longeant, vers l’est de la péninsule, l’Alftafjordur, un fjord donc, de toute beauté. Une rivière naît d’un relief volcanique, des moutons rêvent sous un arc en ciel, une église fige le passé, en une atmosphère à la fois rurale et sauvage. La piste se poursuit jusqu’à Breidabólsstadarkirkja, une autre église veillant sur le fjord, cernée de tombes aux croix immaculées, aux pierres rongées de lichen, avant d’atteindre la rivière Skrauma coulant à travers des gorges étroites, à la beauté tragique. Une géante du même nom s’y serait en effet jadis noyée, une malédiction pesant alors sur le cours d’eau tant que vingt hommes n’y auraient pas disparu. Les 18e et 19e victimes, un père et son fils, s’y noyèrent en 1806. Prudence donc ! Le voyage est loin d’être fini.
Coup de cœur
Et de trois joyaux

Ce pays, l’Islande, recèle tant de joyaux naturels que, par magie, les coups de cœur s’y succèdent. Trois me viennent à l’esprit. Le premier a pour cadre la campagne, au nord d’Hvolsvöllur, à 112 km de Reykjavif (Route 1). Une piste terre noire, une rivière, une église et des torfhus, les plus anciens du genre dans le pays, en fait des maisons en boue tourbeuse, enrichis d’éléments de bois plus anciens. Telle se présente la ferme historique de Keldur, désormais propriété du Musée national d’Islande. La traverse d’une grande salle indique l’année 1641. Keldur et ses habitants sont mentionnés dans les grands textes et sagas du Moyen-Age. Suffisant pour aiguiser l’imagination.
Autre lieu, autre découverte plaisir. Cette fois à Fludir, dans la région du Sudurland, à environ cent kilomètres de la capitale. Les eaux chaudes du Secret Lagoon, la plus ancienne piscine naturelle d’Islande, vous attendent, en un site cerné de solfatares. Décor et bien-être garantis, dans des eaux avoisinant les 38°/40°.
Enfin il ne faut jamais bouder le plaisir d’une dépense énergétique. Direction plein sud, dans le parc national du Vatnajökull et Skaftafell, une de ses zones sauvages, pour découvrir, entre autres, la cascade Svartifoss. Après une marche d’approche d’environ 1h30 pour un dénivelé de 150 mètres, elle s’offre à vous dans un splendide environnement de colonnes de basalte noires.