
Pétra, le trésor d’une civilisation disparue
Pétra, c’est d’abord une apparition. Furtive. Un gré rose lumineux qui vous capte le regard au bout d’un étroit défilé rocheux de plus d’un kilomètre. Puis, au fil des pas, la vision se fait plus précise jusqu’à cette place magique où s’adosse à la paroi, le Trésor, baigné par les premiers rayons d’un soleil dévorant. Ce temple funéraire, haut de 38 mètres, taillé à même la roche, c’est l’image incontournable, la plus rependue de la cité rose rouge. C’est aussi la plus prisée. D’où la nécessité de venir en ces lieux très tôt (le site ouvre à 6 heures), si vous voulez avoir une chance de vous en imprégnez. Après, tout y devient différent. Pétra grouille de visiteurs, de vendeurs ambulants, de propriétaires de chameaux. C’est le moment de se laisser porter au hasard, loin de la foule, vers les tombeaux oubliés. Il en existe 850, répartis sur un site de plusieurs kilomètres carrés. L’idéal est de visiter la cité à pied, de prendre de la hauteur, de la distance, de partir pour mieux revenir. Bref de flâner. L’endroit mérite d’ailleurs d’y rester deux jours. Pétra (rocher en grec) est la capitale des Nabatéens, une ancienne tribu arabe qui s’établit deux siècles avant Jésus Christ sur ce haut plateau, cerné de montagnes, à la croisée des pistes caravanières. Ces nomades enrichis par le commerce de l’encens ont bâti ici, les joyaux d’une civilisation très avancée, dont l’influence débordait sur tout le golfe persique. Dans le gré bigarré, ils ont laissé libre cours à une luxuriance sculpturale désignée comme la symbiose réussie entre l’art oriental et helléniste. Inspirés également par la culture romaine, assyrienne et égyptienne, les tombeaux funéraires, le théâtre, les temples patinés par les siècles sont autant de petites merveilles antiques qui ne peuvent laisser insensibles, même les plus hermétiques à la culture et aux vieilles pierres.
Une mer dans les entrailles de la terre
La mer Morte située à 420 mètres en dessous du niveau de la mer est une curiosité naturelle unique. C’est le point le plus bas du globe. Avant de s’y rendre, prenez le temps de faire une halte au mont Nébo, un haut lieu de la chrétienté (c’est là que Moïse serait mort). Depuis ce site dominant, on peut observer cette dépression en forme de fossé, cette mer fermée (en réalité un lac terminal) alimentée par le Jourdain et quelques oueds, avec sur sa rive droite Jéricho et au loin Jérusalem. La salinité de l’eau est 6 à 10 fois supérieure à celle de l’océan. Conséquence, le corps humain flotte naturellement sans effort. On peut y lire son journal en faisant la planche, les doigts de pied en éventail. Après le bain, il faut évidemment passer sous la douche sous peine de sécher sur pied ! Évidemment cette extrême concentration en minéraux interdit toute vie aquatique et végétale. Mais surtout, la mer morte agonise, s’assèche et ne cesse de perdre du terrain. La faute à la rareté des précipitations, aux chaleurs extrêmes en été (jusqu’à 50 degrés), mais surtout du fait de l’irrigation irraisonnée pratiquée en amont. Le Jourdain, principale source d’eau n’atteint plus aujourd’hui que 10 % de son afflux naturel. Aussi, à ce rythme, la mer Morte pourrait disparaître avant la fin du siècle. Un projet de canal jusqu’à la mer Rouge, porté par Israël et la Jordanie, est toutefois à l’étude pour tenter de sauver cette mer singulière.
Jérash, la romaine
C’est le site le plus connu de Jordanie après Pétra. Jérash, la Pompéi de l’Orient, est la cité romaine la plus vaste et la mieux conservée du Proche Orient. De nombreux vestiges y sont à découvrir à commencer par l’arc Hadrien, un arc de triomphe construit en l’an 129 pour la visite de l’empereur romain, mais aussi le magnifique hippodrome qui accueillait également des épreuves d’athlétisme et des courses de chars. L’enceinte pouvant accueillir pas moins de 15 000 spectateurs est l’une des pièces maitresses des vestiges de Jerash. Le forum est également symbolique de la grandeur de la ville, tout comme les thermes, le théâtre, les temples d’Artémis et de Zeus. Ensevelie durant plusieurs siècles sous les sables, la ville fut redécouverte en 1806 par un explorateur allemand. Compter au moins 3 heures pour visiter l’ensemble du site archéologique
Un désert rouge, le Wadi Rum
En Jordanie, le désert couvre les 3/4 du pays. C’est une charnière minérale entre le monde méditerranéen et l’Orient. Le plus réputé de ces espaces encore préservés, c’est le Wadi Rum, un désert de poche de 25 x15 kilomètres, traversé en son temps par Lawrence d’Arabie. Un désert rouge peuplé de dômes rocheux, de dunes, de vallées profondes, enserrées dans des falaises ciselées qui culminent à plus de 1 000 mètres d’altitude. Le Wadi Rum s’apprécie à pied, loin des pistes, parmi les plantes éparses aux vertus médicinales que ramassent encore les rares nomades qui transhument en ces lieux hostiles avec leurs dromadaires. Les paysages sont somptueux, reposants, notamment le soir et le matin avant que la lumière blafarde n’écrase les reliefs. Le must est de passer la nuit dans un campement, sous une tente en poils de chèvre, de prendre le temps le soir venu, de fumer le narguilé en buvant un thé ou un café à la cardamome.
Coup de cœur
Les mosaïques de Mādabā
Mādabā et les mosaïques c’est une longue histoire. Pendant près d’un millénaire, cette ville moyenne située au nord de la mer morte a été laissée à l’abandon à la suite d’un tremblement de terre dévastateur survenu en 747. Au XIXe siècle, quand de nouveaux arrivants creusèrent pour bâtir les fondations d’une ville nouvelle, ils mirent à jour des mosaïques byzantines à foison. La plus célèbre, découverte lors d’un incendie compose une partie du sol actuel de l’église Saint-Georges. Réalisé avec deux millions de pièces, en 560, cette ensemble exceptionnel représente une carte montrant les sites bibliques d’Egypte et de Palestine. On y voit Jérusalem, l’église du saint Sépulcre, Bethléem, Naplouse… mais aussi le mont Sinaï d’où Moise descendit muni des dix commandements.
Cette mosaïque livre quantités d’informations sur l’époque, notamment la présence du lion dans la Jordanie du bas Moyen âge. A voir également plusieurs chefs d’œuvre de mosaïques en l’église du prophète Elie, mais aussi dans les églises de la Vierge-Marie ou des Apôtres. Fort de son statut, la ville abrite un institut de formation à l’art de la mosaïque et plusieurs entreprises qui font volontiers visiter leurs ateliers. L’occasion de sa familiariser avec cet art décoratif réalisé à partir de tesselles de pierres colorées ou de céramiques débitées à la tenaille et posées sur un épais lit de chaux et de cendres humides.